La France s'apprête à vivre une échéance électorale importante : les élections présidentielles de mi-2007. Il est donc de rigueur, dans un pays où la liberté d'expression est dans la constitution, qui se pâme d'avoir inventé
les droits de l'homme et du citoyen, de censurer discrètement toutes les voix subversives pouvant influencer l'électeur moyen, lui insuffler la tentation de glisser le mauvais bulletin dans l'urne, voir pire : de réfléchir !
Certes - réputation internationale oblige - nous ne pouvons nous permettre de montrer haut et fort combien museler les médias est facile, en créant une institution officielle pour cela. Mais nous sommes malins : nous avons imaginé un système discret et efficace. Il suffit que les grands actionnaires des grands médias dépendent dans d'autres secteurs de leurs activités (les travaux publics, l'armement, etc.) de l'état. Résultat, il est dans leur intérêt de caresser dans le sens du poil les deux présumés vainqueurs de l'élection, à savoir le petit Sarkozy (à ma droite) et Ségolène
(que l'on nomme par son prénom, comprenez, Royal, dans un république, ça ne le fait pas) à ma gauche... pas trop quand même. Et ces patrons vont faire pression ici, supprimer une émission par-là, en changer d'horaire une autre, ça passe plus ou moins inaperçu. Mais quand on fait la liste, on se rend compte que le phénomène est loin d'être anodin.
Et quand un vilain canard comme François Bayrou ose dénoncer en direct, dans l'horaire la plus regardée du plus regardé des médias français, à savoir le 20 heure de TF1, ces manoeuvres que tout le monde avait pourtant tacitement accepter de garder dans l'ombre, c'est le branle-bas de combat. Messieurs Mougeotte (directeur de la rédaction de TF1) et Le Lay (Président de TF1) l'engueulent pour lui rappeler que son rôle est de rester dans son coin, à amuser le téléspectateur aux guignols de Canal+ qui se foutra tranquillement de ses grandes oreilles, en tout cas pas sur TF1, parce que sur cette chaîne il ne passera plus (la rédaction est tellement offusquée par ses propos !).
Mais François ne se démonte pas, en vient en parler sur des émissions comme Arrêt sur image, sur France5. Dans cette émission, on décortique, on analyse les images des différents médias, on débat de tout ça, bref un moment de télévision à ne pas mettre entre toutes les mains. Au point que, comme l'explique son animateur Daniel Schneidermann, l'on se décide à réagir : le site web qui diffusait auparavant la version avant montage diffusera désormais la version coupée qui passe à la télévision. Pour des raisons juridique
! Et comme ça, pour le bien du citoyen (vous en doutiez ?), ce dernier ne pourra avoir accès aux propos qui auraient pu échapper à l'un des intervenant.
Mais il y a bien sûr des gens qu'il est difficile de comprendre. On a beau leur expliquer que tout est fait pour leur bien, pour vivre mieux dans une société meilleure, ils refusent. On a beau leur expliquer, tout les matins, à la radio, tout les soirs, à la télé, en détails, pour qui voter, qu'acheter, que faire, ils ne veulent pas écouter. Certains d'entre eux ont même créé une pétition pour avoir de nouveau accès à la version non coupée d'Arrêt sur image !
Si vous faites partie de ces citoyens là, veuillez signer, cela permettra de vous repérer plus facilement afin de procéder à votre internement, pour vous guérir. L'état français vous promet une guérison totale pour les élections présidentielles, avec adhésion à l'UMP en option.
Et dans votre lit d'hôpital, vous pourrez toujours regarder la version coupée d'arrêt sur image sur François Bayrou et les médias.
Commentaires
Sans oublier que cette chère Béa va peut être devoir s'éclipser du JT pour cause d'avoir un ministre de mari
Il feraient mieux de filtrer les conneries et les moments de vente de cerveau
Problème : il ne resterai plus grand chose.
M. Soulougniac, le DG de France Télévision Interactive qui gère les sites internets de la chaîne nous gratifie d'une réponse suite au passage du 2000ème signataire de la pétition :
www.france5.fr/asi/H00002...
Plusieures remarques s'imposent.
Pour le grand chef des sites de France Télévision, harmoniser la qualité de diffusion des émissions de France 5 sur france5.fr consiste à passer en logiciel propriétaire ce qui gène considérablement les utilisateurs de mac, sans améliorer la qualité de l'image.
Internet, ça consiste à faire de la télévision sur le web, ni plus ni moins. Pas question d'utiliser les pleines potentialités de la toile, par exemple en diffusant une émission dans son intégralité. Dans ces conditions, on se demande quelle est la valeure ajoutée d'internet pour cette chaîne de télévision.
Le service public est tellement pauvre qu'il ne peut pas se permettre de mettre en ligne 15 minutes d'émission en plus. Par contre, il a les moyens de payer une licence inutile à microsoft.
FTVI est tellement frileuse que même la présence d'un juriste de France 5 en plateau lors de l'enregistrement de l'émission ne le rassure pas. Ils préfèrent déployer le parapluie en grand et s'en remettre intégralement aux juristes de la chaine sur une version déja montée. Pourtant, jusqu'à présent, ASI en 11 ans de diffusion n'a a déplorer qu'une seule et unique procédure judiciaire (en cours). Pourquoi les avocats de France 5 ne pourraient pas se pencher sur la version non montée ? Mystère.
Une telle frilosité, un tel conservatisme fait peine à voire.
Surtout que cette sorte de censure n'est pas un cas isolé. De là à faire le lien avec une certaine élection prochaine... il n'y a qu'un pas, que les responsables de diverses émissions/journaux/médias nous expliquent qu'il ne faut pas franchir, à l'aide de motif à chaque fois falacieux.
Pour l'histoire des formats propriétaires, je n'étais pas au courrant. Merci de l'information (utilisateur de Linux, j'ai le même problème que les utilisateurs de Mac OS).
Evidament, je me suis posé la question, comme tout le monde du rapport à l'élection présidentielle. Et là je ne sais pas trop. En fait j'ai l'impression que c'est plus compliqué que ça.
Je crois que c'est lié, mais d'assez loin. En fait, la télé publique a été mise dans un grand groupe, France télévision qui rassemble des filiales : France 2, 3, 4, 5, France O etc... et France Télévision Interactive qui gère les sites internets.
Je crois que FTVI ne veut pas prendre en charge le coût de la validation juridique de l'émission intégrale. Ils veulent que ce soit France 5. Mais en même temps, ils cherchent à gagner en autonomie. Donc ils ne veulent pas que un juriste de France 5 bosse pour eux. Et du côté de France 5, ils ne veulent pas se prendre la tête à vérifier un truc pas encore monté par la boite de production qui leur vend arrêt sur image.
En fait FTVI veut juste jouer le rôle de tuyaux et France 5 n'a pas envie de s'embêter à bosser pour une autre structure spécifiquement. D'où ce formatage absurde des contenus.
J'ai l'impression qu'ils veulent couper les ponts le plus vite possible avant le changement de ministre de la culture et le renouvellement d'1/3 des posts au CSA.
Enfin, c'est une explication.
Merci encore pour toutes ces informations sur les rouages de cette affaire. C'est vrai que c'est plus complexe que ça en a l'air. Mais je n'ai pas le souvenir (depuis les quelques années où j'y m'interresse à ce genre de chose) d'avoir un aussi grand nombre de censures / bridages / réorganisations dans les médias, pas même avant la précédente élection.
Ça peut faire un peu théorie du complot, mais quand on voit que les propos tenus par le pdg de TF1 (certes chaîne privée, mais avant tout chaîne de télévision, donc pas si éloignée de France Télévision), je me demande s'il n'y a pas des gens que tous ces problèmes juridiques arrangent bien, et qui savent le dire à qui de droit chez France Télévision, pour éviter qu'ils ne soient rêglés simplement.
La pub de télérama, le blog de Béréno, Là bas si j'y suis, le bouquin sur la femme de Sarkozy et Paris Match, Laurent Mauduit poussé dehors et censuré par l'allié de l'actionnaire majoritaire du "Monde", les pubs qui dérange les catholiques, les dessins qui dérangent les musulmans...
On a peut-être brisé des tabous : celui du retour massif de la censure. Celle-ci devient à nouveau un moyen de résoudre les problèmes. Ou alors elle se voit plus qu'avant. Ou alors un peu des deux.
Jusqu'au jour ou ça va pêter.